Au lendemain de l’assassinat de Ntare V, le 29 avril 1972, les tueries visant surtout les intellectuels Bahutu ont aussitôt commencé dans différentes communes de la province de Gitega. Les déplacements ont été écourtés entre Bujumbura et Gitega. Les responsables des services d’Etat ont été les premiers sur la liste des candidats à l’assassinat.
Willy NTAKARUTIMANA
La commune de Nyarusange, détachée de la commune de Gishubi après 1972
Elle se trouve dans la province de Gitega. La CVR y a mené des enquêtes sur le génocide de 1972. Les témoins qui ont parlé à la Commission se souviennent encore du carnage. Certains attendent toujours en vain, les leurs qui ont été convoqués au tribunal. Une situation d’angoisse et de douleur accable encore aujourd’hui les familles des victimes. « Nous nous attendions à ce qu’ils soient tués et jetés dans des fosses communes », racontent d’un des témoins de la CVR.
L’un des anciens fonctionnaires de l’État qui a échappé de justesse à la mort a témoigné. Il est originaire de la sous- colline Ruhama, colline Muhororo, zone Bukoro dans la commune de Nyarusange. Samedi le 29 avril 1972, il s’apprêtait à descendre à Bujumbura. Arrivé à la gare, les transporteurs lui ont dit que le transport entre Bujumbura et Gitega avait été suspendu suite à l’assassinat de Ntare V. Il n’a eu d’autre choix que d’écourter son trajet.
Et les passagers qui allaient prendre le bus à Kibumbu ont été tués à Nyakararo, a déploré le témoin. J’en connais au moins 7. Des victimes étaient arrêtées, certaines sur leurs collines de résidence, d’autres en cours de route, et beaucoup d’autres au service et ailleurs, disent ces témoins.
D’autres se souviennent encore du carnage qui a eu lieu dans la zone Nyabiraba , qui fait toujours partie de la commune de Gishubi, limitrophe de la commune de Gitega et de Makebuko. Au lendemain du déclenchement du génocide de 1972, des témoins ont dit avoir vu des militaires à bord d’un camion allant arrêter un certain Lucien, directeur d’une école primaire à Nyabiraba. Et après, un prêtre du nom de Samandari, un citoyen nommé Jean Ntagunama et un autre appelé Kibuye Pierre qui était Bourgmestre de la commune de Nyabiraba à l’époque.
On arrêtait seulement des Bahutu
Ces arrestations se sont poursuivies même après juillet 1972. Nos témoins donnent encore les noms d’autres fonctionnaires Bahutu. Il s’agit notamment d’un enseignant qui s’appelle Buraduguye et d’autres citoyens comme Butabo Astère, un enseignant ancien parlementaire du parti UPRONA de l’époque du Prince Louis Rwagasore et de son fils séminariste prénommé Venant, un autre enseignant connu sous le nom de Minani, un autre ancien bourgmestre nommé Ntacobigira qui administrait la région de Nyabitanga, un assesseur nommé Baretse, un enseignant prénommé Léon, sans oublier Antoine qui était « garde-marché » de Nyabitanga, et de nombreux autres Bahutu présents autour de la commune de Nyabiraba.
En arrêtant ces victimes, ces militaires, souvent accompagnés d’élus locaux, les accusaient d’être des « Mayi-mulele » qui s’opposaient au régime du Président Micombero. Il fallait alors les emmener pour vérifier si leurs corps ne portaient vraiment pas des incisions « indasago », expliquent nos témoins qui ajoutent que les victimes étaient aussi arrêtées par des gens de la commune de Ryansoro. Elles étaient ensuite rassemblées au bureau communal de Nyabiraba pour être emmenés ailleurs.
Selon les mêmes témoins, à Nyabiraba comme à Gishubi, il n’y a pas de fosses communes des victimes du génocide de 1972. Toutes les victimes étaient emmenées, soit vers la commune de Giheta, soit aux fosses communes situées près de la rivière Ruvubu.
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