Gitega : l’Ecole Normale de Kibimba envahie par des militaires

Gitega : l’Ecole Normale de Kibimba envahie par des militaires

Le 1er mai 1972, les militaires procèdent à l’inscription systématique et ethnique des élèves à l’Ecole Normale de Kibimba, actuelle Ecole Normale Arthur Chilson de Kibimba . C’était juste un jour après le jour du déclenchement du génocide commis contre les Bahutu. Quelques jours plus tard, des soldats à bord de camions militaires appelés « Je m’en fous » sont venus chercher tous les élèves Bahutu. Battus, entassés dans ces camions comme des sacs de ciment, personne ne sait jusqu’à aujourd’hui l’endroit où ils ont été emmenés.

Willy NTAKARUTIMANA

Le 29 avril 1972, les élèves Bahutu et Batutsi de l’Ecole Normale de Kibimba qui vivaient en paix ont d’abord été divisés ethniquement par des militaires. Et le lendemain, ces derniers commencent à dresser la liste dans laquelle chaque élève est appelé à mentionner son appartenance ethnique. Comment auraient-ils pu refuser cet ordre alors qu’ils étaient sous le regard méchant de soldats assoiffés de sang?

Quelle serait la réaction du personnel enseignant et de la direction de cette école qui était sous le contrôle d’un directeur américain, Paul FAN BURG ! Ils étaient sûrement déjà au courant de l’assassinat, la veille, de l’ex-roi Ntare V, Charles Ndizeye, dans le camp commando qui sera baptisé plus tard camp Ntare Rugamba, à Gitega.

La distance entre Kibimba et la ville de Gitega n’est pas assez longue pour que cette information ne se propage pas, expliquent certains témoins oculaires et rescapés de cet événement.

Selon ces anciens élèves de cette école, après quelques jours, ces militaires sont retournés à ladite école en possession de cette liste. Les élèves se sont sentis un peu gênés et effrayés par la présence des militaires dans la cour intérieure de l’école.

La cour intérieure de l’Ecole Normale Athur Chilson de Kibimba, Ecole Normale de Kibimba en 1972

Et soudain, ces militaires ont sorti la liste et ont commencé à les appeler pour les sélectionner. Après l’appel nominal, les élèves Bahutu sont regroupés dans le premier dortoir ; les Batutsi, dans l’autre. A cette époque, l’Ecole Normale de Kibimba disposait de deux dortoirs : l’un pour les nouveaux dits « aba new », et l’autre pour les vétérans.


Au bout d’un certain temps, des militaires à bord de camions militaires en provenance de la province de Muramvya sont venus à cette école et ont immédiatement commencé à frapper les élèves Bahutu, exigeant qu’ils montent à bord de ces camions sous les coups de bottes militaires et bâtons.

Des élèves Batutsi embarqués dans des camions vers leurs parents.

Qui pourrait sauver ces élèves kidnappés et emmenés dans un environnement inconnu ? s’interrogent lamentablement nos témoins. Ils y étaient empilés comme des fardeaux. D’autres ont été embarqués dans un autre camion baptisé  » secours » qui servait à transporter les provisions pour les élèves.

Ces élèves arrêtés étaient ceux de la 7e année préparatoire à ceux de l’année pédagogique et ceux de la première année Normale. Les camions se sont ensuite dirigés vers la rivière Kaniga en direction de la province de Muramvya, se rappellent les mêmes témoins.

Les enlèvements ont duré au moins deux semaines. Et, n’eût été les élèves qui ont réussi à s’échapper par les fenêtres, tous les élèves Bahutu et les domestiques de cette école seraient tous tombés comme des mouches aux mains des militaires du camp de Muramvya, expliquent encore nos témoins.

Les élèves Batutsi ont passé deux semaines en toute sécurité. Les militaires sont retournés dans cette école pour déplacer ces élèves Batutsi dans leurs maisons respectives. Après les deux semaines, c’était le tour des habitants Bahutu des collines environnantes. Celui qui n’a pas fui, a été tué !

La direction de l’Ecole Normale Arthur Chilson de Kibimba , Ecole Normale de Kibimba en 1972


Cependant, d’autres sources révèlent plutôt qu’au moins trois élèves Bahutu ont eu la chance de rester en vie, mais ils se sont enfuis vers la tombée de la nuit. L’année scolaire n’était pas complètement terminée.

Le dernier enlèvement a eu lieu le 20 juin. Il restait le travail de remise des attestations scolaires aux élèves finalistes, disent ces témoins qui ajoutent aussi que même les enseignants Bahutu n’ont pas été épargnés par ce carnage. Le Directeur de l’école, Fan Burg, s’était vu interdire d’avance de s’impliquer dans cette affaire.

Please follow and like us:
Pin Share
Actualités Français