Burundi/Eglise catholique : berceau et élément gênant pour Micombero et Bagaza

Burundi/Eglise catholique : berceau et élément gênant pour Micombero et Bagaza

La CVR mène depuis plus d’un mois des enquêtes sur les discriminations socio-ethniques qui ont caractérisé les régimes des présidents Micombero Michel et BAGAZA Jean Baptiste. Parmi les personnes ressources, les évêques émérites n’ont pas été épargnés. Monseigneur Stanislas KABURUNGU pour sa part, les deux présidents ont oublié qu’ils ont grandi dans la paroisse de Rutovu, avant que l’église ne devienne leur élément gênant pour leur pouvoir.

Actuellement à l’âge de la retraite, Mgr Stanislas Kaburungu, évêque émérite, se souvient encore des périodes sombres qu’a traversées le Burundi sous les deux régimes. Il s’agit notamment du génocide de 1972 qui a coûté des milliers de vies humaines des Bahutu, y compris des religieux, et les crimes dont certains Batutsi ont été victimes, parce qu’ils n’étaient pas originaires de la province du Bururi, ou tout simplement pour avoir dénoncé les actes inhumains causés par le régime Micombero, ainsi que l’expulsion sauvage des missionnaires au Burundi par son successeur, le président Bagaza.


Dans la province de Ngozi, ce prélat se souvient encore du gouverneur militaire Bizoza Joseph qui, épris d’animosité pour massacrer les Bahutu de Ngozi. Cependant Bizoza n’a pas épargné les Batutsi avec lesquels il était pourtant de même ethnie. « Ce gouverneur sanguinaire estimait qu’il n’y avait d’autres Batutsi dans le pays qu’à Bururi seulement », comme nous l’ont raconté nos différents témoins rencontrés dans cette province.

Séance d’audition de l’Évêque Emérite, Monseigneur KABURUNGU Stanislas

Après avoir renversé le président Micombero en 1976, le président Bagaza ne toléra pas la présence de missionnaires. Pour cet évêque émérite , une cause de désaccord émane d’une correspondance que les évêques lui ont envoyée en 1977 pour lui demander l’autorisation de tenir des réunions sur les collines, car ces réunions étaient le privilège exclusif du parti Uprona.
A cette époque, poursuit Mgr Kaburungu, le président Bagaza s’était rendu au Rwanda et avait été accueilli par les huées des réfugiés Barundi. A son retour au palais, il trouva cette lettre dans son bureau et il n’a pas tardé à prendre la mesure de chasser les missionnaires. C’est à partir de cette période qu’il commença à chasser les missionnaires.

Les Missionnaires Comboniens ont été les premiers à être expulsé par le Président Bagaza dès sa deuxième année au pouvoir. La même année, Mgr Joseph Martin, Evêque émérite de Bururi, fut empêché de fouler le sol burundais, après un séjour à l’étranger. Mgr Kaburungu estime que c’est dans ces circonstances que le climat de désaccord entre l’Église catholique et l’État s’est envenimé, même si cette vérité est restée cachée. Selon Mgr Kaburungu, le président Bagaza ne pouvait pas attaquer de front les évêques Barundi (Batutsi et Bahutu) car ils étaient unis et partageaient leur analyse de la situation.

Chasser les missionnaires, une forme de discrimination

L’évêque émérite, Mgr Kaburungu semble mécontent des maux que ces deux présidents ont causé alors qu’ils ont grandi en milieu paroissial. Ils ont chassé nos missionnaires après avoir constaté qu’il était impossible de créer une politique de division entre les évêques Barundi, a souligné Mgr KABURUNGU. Chasser nos missionnaires était aussi une forme de discrimination, a-t-il indiqué en soulignant que ces deux présidents avaient été éduqués par les mêmes missionnaires qu’ils pourchassaient.

Ecole Moyenne Pédagogique de Musenyi/Tangara sous le régime Bagaza : une des écoles qui ont été visitées par la CVR

L’Evêque émérite Kaburungu reste toujours convaincu que si la paroisse de Rutovu fondée en 1940 n’avait pas existé, les présidents MICOMBERO et BAGAZA seraient toujours restés derrière leurs moutons et leurs chèvres car, s’ils ont réussi à évoluer, c’est grâce à l’Eglise catholique qui a construit des écoles à Rutovu, a expliqué Mgr KABURUNGU.

Il dénonce la politique discriminatoire dans le domaine éducatif qui consistait à mettre les lettres (i) et (u) respectivement devant les noms des élèves Batutsi et Bahutu. Le ministère de l’Éducation avait même sorti une correspondance qui instruisait cette politique. « Cette correspondance, je l’ai lue de mes propres yeux, via un directeur d’école à Mivo », a déclaré Mgr KABURUNGU. La CVR poursuit ses enquêtes sur la politique socio-ethnique discriminatoire qui a marqué les deux régimes.

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