Cibitoke : l’exploitation des lieux de mémoire risque d’effacer les traces des enquêtes sur les crises du passé.

Cibitoke : l’exploitation des lieux de mémoire risque d’effacer les traces des enquêtes sur les crises du passé.

Mercredi le 13 mars 2024, la CVR a poursuivi sa mission d’information et de sensibilisation sur les résultats des enquêtes sur les différentes atrocités que le Burundi a vécu depuis la période coloniale jusqu’au génocide commis contre les Bahutu du Burundi en 1972- 1973. Cette activité a eu lieu au chef-lieu de la commune de Rugombo. En plus de Bururi et Rutana, la province de Cibitoke faisait partie des provinces non encore visitées par la CVR et dont la population a encore soif de connaître cette vérité.


Comme d’habitude, cette activité est toujours caractérisée par le visionnage d’un film documentaire produit et réalisé par la CVR dont les images reflètent la vérité sur la planification, le mode opératoire et les conséquences de ces atrocités. Mais avant ce visionnage, la CVR fait une communication liminaire qui éclaire également ces différentes crises.

De gauche à droite : Pasteur Clément Noé NINZIZA et Abbé Pascal NIYONKURU, respectivement Vice-Président et Commissaire de la CVR


L’équipe CVR déployée dans cette province était représentée par le Pasteur Clément Noé Ninziza, Vice-Président de la Commission. Celui-ci a souligné qu’en plus de présenter le rapport de la CVR aux deux chambres du Parlement burundais, la CVR espère que le grand nombre de la population burundaise, y compris les représentations des différentes institutions du Burundi, puisse connaître cette douloureuse vérité ainsi que les missions de la Commission.


Le film projeté lors de cette rencontre est celui qui parle des enquêtes de la Commission sur les crimes que le Burundi a connu depuis la période coloniale jusqu’au génocide de 1972-1973. Ce film n’a pas laissé ces participants indifférents puisque certains d’entre eux se souviennent encore de ces périodes, et d’autres rassurent avoir perdu parents et amis dans ces crises, notamment le génocide contre les Bahutu.

Les différentes questions qui ont marqué cette rencontre étaient liées au génocide de 1972-1973. Tubirabe Rubin, conseiller du gouverneur provincial de Cibitoke, a salué les efforts que la CVR a déployés dans la recherche des fosses communes dans cette province. Les participants à la réunion ont reconnu certains membres de leurs familles victimes de ce génocide et les lieux où leurs corps ont été jetés.


Mais ils déplorent les moyens de recherche archaïques qu’utilise la CVR et demande à la Commission de coopérer avec les Occidentaux afin qu’ils puissent lui donner des outils modernes de recherche et de détection des fosses communes. Ils affirment qu’à la brigade Cibitoke, il y aurait une fosse commune malgré que la CVR y ait effectué des recherches, sans succès.


D’autres estiment qu’il sera très difficile pour les Blancs de s’impliquer activement dans les missions de la CVR, car les enquêtes ont déjà montré que ceux-ci comptent parmi les principaux acteurs de ces atrocités. En plus de cela, un mandat de quatre ans pour une telle commission s’avère très court alors que le travail d’enquête est immense. Il ne serait pas bon d’écourter les enquêtes alors que les familles des victimes ont besoin de connaître la vérité.

Séance de questions et réponses : les participants posent des questions à la délégation de la CVR

D’autres questions posées étaient relatives au processus de restitution des biens spoliés. Et pour d’autres, même si la CVR déclare poursuivre les enquêtes sur les crimes qui ont suivi le génocide de 1972-1973, notamment les crises de 1993 et plus, les traces des enquêtes s’effacent progressivement au profit du développement. Le cas le plus particulier étant celui des lieux qui hébergent des fosses communes et qui sont peu à peu exploités au risque d’effacer les traces des investigations.


Le Vice-Président de la CVR, Rév. Clément Noé Ninziza a souligné qu’il est difficile de retrouver toutes les fosses communes car les auteurs de ces crimes étaient de grands stratèges. Après avoir jeté les victimes dans ces fosses communes, ils étaient assurés que, même après un certain temps, il n’y aurait plus aucune trace. Il leur a rappelé que le génocide ne s’explique pas par le nombre excessif de victimes, mais plutôt par l’intention qui sous-tend l’acte de meurtre, l’exécution et le mode opératoire. Ceci explique que les résultats des investigations ne proviennent pas des fosses communes découvertes.


A noter que dans la province de Cibitoke, la CVR a déjà exhumé une fosse commune de victimes de 1972-1973 et le nombre de victimes s’élève à 5. Toutefois, les recherches des fosses communes ont été menées à la brigade de police de Cibitoke et ailleurs mais en vain. La CVR lance une nouvelle fois un appel aux témoins de contribuer à cette mission de recherche de la vérité au service de la réconciliation.

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