Génocide de 1972-1973 : Le passé douloureux doit servir de leçon aux Burundais

Génocide de 1972-1973 : Le passé douloureux doit servir de leçon aux Burundais

Depuis avril 1972 jusqu’à ce mois-ci, la CVR et des milliers de Burundais se remémorent les massacres, les atrocités et les violations graves des droits de l’homme perpétrés contre les Burundais de toutes ethnies par le régime du Président Michel Micombero il y a 52 ans. Pour la CVR, il est crucial que ce mois ne passe pas inaperçu, étant donné l’importance d’informer et de sensibiliser les Burundais sur la qualification juridique du génocide contre les Bahutu du Burundi, une qualification établie à la suite des enquêtes de la CVR, bien que les Batutsi et les Batwa aient également été victimes de crimes contre l’humanité.

Parmi les invités figuraient des témoins de l’époque de ce génocide ainsi que des familles des victimes. Ces derniers ne pouvaient rester silencieux, car ils portent encore les séquelles de cette tragédie.

Dr Pierre Claver Kazihise: il est encore bien trop tôt pour les Burundais de tourner cette page

Dr Pierre Claver Kazihise, était élève dans une école secondaire de Gitega. Il exprime son désaccord avec certains Burundais qui estiment que depuis la qualification du génocide, la CVR semble ne pas avoir d’autres nouvelles à apporter alors que le pays a été le théâtre de nombreux crimes au fil des années. Pour lui, le génocide est un crime qui a été perpétré dans peu de pays à travers le monde entier. Compte tenu de sa gravité et des conséquences qui en découlent, il est encore bien trop tôt pour les Burundais de tourner cette page. La CVR devrait plutôt multiplier les séances d’information et de sensibilisation afin de permettre à la majorité des Burundais de bien comprendre la tragédie qu’a vécue le Burundi en 1972. Cet avis a été partagé par un grand nombre de participants à la conférence.

L’ancien Premier Ministre, Adrien Sibomana: le travail de la Commission met en lumière les souffrances endurées par le pays durant cette période

L’ancien Premier Ministre, Adrien Sibomana, a pour sa part indiqué qu’en 1972 il était un élève finaliste des Humanités. Il a salué le travail de la Commission qui met en lumière les souffrances endurées par le pays durant cette période. Cependant, il craint que la situation ne se reproduise et espère que cela sera pris en compte comme une leçon pour les Burundais afin qu’ils n’aient pas à revivre une telle tragédie.

D’après les participants, il y avait également des élèves des différentes écoles primaires et secondaires qui étaient complices du massacre de leurs camarades Bahutu. La CVR rappelle ici les cas d’écoliers tués et emballés dans des sacs à Mutangaro en commune Rutovu, des élèves tués à l’école normale de Kiremba Sud en province de Bururi, ainsi que dans bien d’autres écoles ayant connu ces crimes. Les participants accusent le régime Micombero d’avoir commis ces crimes. Ils soulignent que le président Micombero n’a pas eu le courage de prendre des mesures drastiques pour mettre fin à des actes barbares, selon les témoins.

En plus des tueries, ces témoins rappellent que les biens des victimes ont également été pillés de deux manières. D’une part, des individus se sont directement approprié des maisons, des voitures et des terres agricoles après avoir tué leurs propriétaires. D’autre part, l’État s’est empressé de récupérer les belles maisons ayant appartenu aux victimes, dont les familles continuent de demander la restitution. La CVR dispose de listes de maisons saisies, de comptes bancaires bloqués et de voitures appartenant aux victimes. Les témoins expliquent que puisque l’État est une continuité du pouvoir, l’État actuel doit participer activement à ce processus de réhabilitation des familles affectées.

Une partie des Commissaires présents à la conférence

Les Commissaires de la CVR ont répondu aux diverses questions, préoccupations et inquiétudes des participants concernant le génocide de 1972-1973. Ils leur ont rappelé que la CVR détient toutes les informations sur la préparation, le modus operandi, les cibles, les auteurs, les lieux de mémoire et les conséquences néfastes de ce génocide. Pour le Président de la CVR, la Commission a déjà qualifié les crimes du Burundi depuis la période coloniale jusqu’au génocide contre les Bahutu en 1972-1973.

Amb. Pierre Claver Ndayicariye : la mission de recherche de la vérité nécessite de la prudence.

Amb. Pierre Claver Ndayicariye a ajouté que la Commission entamera bientôt des enquêtes sur d’autres crises ultérieures, notamment celle de 1988 que le pouvoir de l’époque a appelé « crise de Ntega et Marangara », et celle de 1993 consécutive à l’assassinat du Président Melchior Ndadaye. Le Président de la CVR comprend que les Burundais veulent connaître la vérité sur toutes les crises que le Burundi a traversées, mais il leur demande de faire preuve de patience, car la mission de recherche de la vérité nécessite de la prudence.

Please follow and like us:
Pin Share
Actualités Burundi