Au lendemain de la rencontre avec les grands séminaristes de Songa (séminaire interdiocésain Saint Jean Paul II de Gitega), les membres de la Commission Vérité et Réconciliation ont repris le bâton de pèlerin vers l’Université Polytechnique de Gitega (UPG) pour expliquer les missions de la CVR, les réalisations et les perspectives d’avenir.
Gérard Mfuranzima
La CVR avait déjà visité l’UPG en 2020. Il n’y avait pas encore à l’époque beaucoup de réalisations à montrer à la Communauté universitaire assoiffée de tout savoir sur la Justice transitionnelle.
En ce début de weekend du 11 mars, il a fallu que le Commissaire Me.Déogratias Ndikumana revienne à la source pour expliquer d’où vient la CVR, la période de son mandat (1885-2008), les exhumations, les enquêtes et investigations en cours, etc.
Mais le temps fort de la rencontre a été le visionnage du film vidéo sur les réalisations de la CVR en 2021. Au préalable il avait été demandé aux participants d’avoir un cœur dur face à des images choquantes qu’ils allaient voir. Mais, comment résister à la réaction humaine d’angoisse et de soupirs en voyant des crânes humains et autres effets personnels exhumés dans tout le pays ?
Commissaire Me Déogratias Ndikumana a expliqué : ce sont en fait des ossements humains des victimes du génocide des Bahutu qui a eu lieu en 1972. De plus, les Batutsi et les Batwa n’ont été épargnés lors de ces tueries.
Un moment privilégié de questions et de réponses
Le film vidéo a été suivi par un moment d’échanges. Et les jeunes universitaires ont demandé : quand allez-vous terminer les investigations sur une aussi longue période (1885-2008) ? La vérité, d’accord, mais est-ce que la réconciliation est obligatoire ? Quelle a été la responsabilité de l’Etat, de l’armée et de la justice dans les tueries de 1972 ? Comment parvenez-vous à identifier lors des exhumations, des ossements datant de plusieurs périodes de tueries ?
Et plusieurs autres demandes toutes aussi pertinentes : Vous connaissez des auteurs des massacres de 1972 : pourquoi ne les interrogez-vous pas ? Ecrivez l’histoire du Burundi contenant aussi ces pages sombres de notre pays ! Est-ce que le Burundi n’aurait pas été influencé par ce qui est arrivé au Rwanda, un pays voisin qui a aussi connu des tueries à grande échelle ?
Nous avons appris que certains auteurs présumés de ces tueries ont avoué les crimes qu’ils ont commis ! Faites la géolocalisation des fosses communes ! Etes-vous parvenus à identifier l’origine du génocide au Burundi ? Pourquoi la CVR veut-elle connaître la Vérité et réconcilier les Burundais sans passer par la Justice ? Disposez-vous de techniques sûres de réconciliation ? S’il vous plaît, élargissez votre Commission jusque dans les Provinces et dans les Communes du pays !
Le Recteur de l’UPG, Silas Sayumwe a félicité la CVR pour le travail déjà fait et lui a souhaité une bonne continuation dans le sens de la consolidation de la paix et de la réconciliation.
Le Vice-président de la CVR, Rév. Clément Noé Ninziza était le co-animateur de la rencontre. Il a démontré l’authenticité des ossements exhumés par la Commission surtout que les fosses communes dans lesquelles ils ont été retirés ont été montrées par les acteurs même de la crise de 1972.
Répondant à l’une des questions quelque peu embarrassante – celle de savoir si la réconciliation est obligatoire, le Commissaire Elie Nahimana a dit : « Non, la réconciliation n’est pas obligatoire, mais là où la justice classique ne peut pas être efficace, la justice transitionnelle est parfois nécessaire ».
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