Depuis un mois, la Commission Vérité et Réconciliation (CVR) a entamé la réception des dossiers liés aux conflits fonciers, une mission qui lui a été récemment confiée après la fin du mandat de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB). Plus de 35 000 dossiers sont en attente de traitement, offrant un espoir renouvelé pour les Burundais concernés.
La Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB), dont le mandat a récemment pris fin, a laissé derrière elle un nombre considérable de dossiers non résolus. Des jugements qui n’ont pas été rendus ou exécutés continuent de susciter la frustration des justiciables, qui voient leurs terres exploitées par des tiers, souvent au détriment des ayants droit légitimes. Cette situation, qui persiste malgré les efforts déployés, a fait naître un sentiment d’injustice chez de nombreuses victimes.
Extrait des archives de la Commission Vérité et Réconciliation : listes des maisons saisies en 1972 dans la province de Rumonge
La Commission Vérité et Réconciliation : une mission élargie pour la réconciliation
Face à cet héritage complexe, la Commission Vérité et Réconciliation(CVR) se voit désormais investie d’une nouvelle mission : la gestion des dossiers fonciers non résolus. Cette tâche, intégrée dans son mandat de recherche de la vérité sur les crimes commis depuis la période coloniale (1885) jusqu’à la fin de la belligérance au Burundi (2008), est perçue comme une réponse à la demande croissante de justice foncière au Burundi. Avec plus de 35 000 dossiers à traiter, la Commission Vérité et Réconciliation devra relever un défi de taille pour rétablir les droits des victimes et restaurer leur confiance.
Des victimes privées de leurs biens
Au-delà des crimes atroces et des exactions extrajudiciaires documentés par la Commission Vérité et Réconciliation , de nombreuses victimes ont été dépossédées de leurs biens, notamment des terres et des parcelles. Des témoignages révèlent que certains individus se sont approprié ces biens en obtenant frauduleusement des titres de propriété, parfois même en vendant ces propriétés à des tiers. Ces spoliations ont souvent été accompagnées de violences, contraignant les propriétaires légitimes à l’exil, laissant leurs biens à la merci des usurpateurs.
Lors d’une rencontre avec les habitants de Rumonge au chef-lieu de la commune en janvier 2024, Nyanga Mossi, fille de feu Maronko Mossi, administrateur communal de Rumonge en 1972, a de nouveau réclamé les parcelles léguées par son père
Le retour des exilés : une lutte pour la réhabilitation
Avec le retour progressif de la paix et de la sécurité, certains Burundais exilés ont retrouvé le chemin de retour dans le pays, mais se sont heurtés à la dure réalité de l’usurpation de leurs biens. Parmi les attentes exprimées lors du processus de réconciliation figure la réhabilitation des familles des victimes, ainsi que la restitution des biens injustement saisis. Les conflits fonciers, omniprésents sur l’ensemble du territoire, représentent un défi majeur pour la Commission Vérité et Réconciliation dans sa quête de justice.
Patience et persévérance : les clés d’une réconciliation durable
La CVR, consciente de l’ampleur du travail à accomplir, appelle les Burundais à la patience et à la persévérance. Ce processus de réconciliation, long et complexe, demande du temps pour éviter de reproduire les erreurs du passé. En prenant en charge les dossiers fonciers, la Commission Vérité et Réconciliation offre une nouvelle voie vers la réhabilitation des victimes, contribuant ainsi à l’édification d’une paix durable au Burundi.
La mission de la Commission Vérité et Réconciliation dans le traitement des conflits fonciers s’inscrit dans un contexte historique de spoliations et de violences. Si le chemin vers la réconciliation est semé d’embûches, la détermination des justiciables et l’engagement de la Commission Vérité et Réconciliation pourraient bien marquer le début d’une nouvelle ère de paix au Burundi.