La Commission Vérité et Réconciliation (CVR) poursuit sa mission avec l’affichage public des listes des victimes causées par des crises qui ont endeuillé le pays de 1885 à 2008. Cette initiative majeure, déployée simultanément dans six provinces, marque un tournant dans la quête de vérité au Burundi. Plus de 40 000 victimes ont été recensées.
Jeudi le 10 avril 2025, la Commission Vérité et Réconciliation a lancé une opération d’envergure pour afficher les listes des victimes des crises au Burundi (1885-2008) dans les provinces de Makamba, Rutana, Ruyigi, Muyinga, Kirundo et Karusi. Dans la province de Karusi précisément, une équipe de la Commission a travaillé dans les communes de Gihogazi, Mutumba et Buhiga, recueillant des témoignages sur cette étape cruciale vers une guérison nationale.

« L’affichage de ces listes permet aux personnes ayant recensé leurs proches de vérifier si les données qu’elles ont fournies correspondent bien à celles figurant sur les listes « , explique Pierre Vyerwanimana de la colline Rutegama dans la commune de Gihogazi. Bien que jeune pendant la crise de 1993, il reconnaît l’ampleur des violences intercommunautaires qui ont décimé des familles et détruit des maisons, préconisant un renforcement de l’éducation civique et du pardon pour permettre aux Burundais de vivre en harmonie.
La réhabilitation : compagne nécessaire de la réconciliation
Dans la commune de Buhiga, si les témoins apprécient l’initiative d’affichage, ils soulignent qu’une réconciliation significative nécessite une réhabilitation tangible des biens des victimes. Edith Mora Ndoricimpa, résidente de Buhiga, met en évidence l’impossibilité d’attribuer une valeur à la vie humaine, suggérant que bien que l’État ne puisse pas indemniser financièrement toutes les familles des victimes, il pourrait fournir un soutien par la construction de logements, le financement de petits projets agricoles et l’érection de monuments commémoratifs sur les collines touchées.

Dévoiler des vérités enterrées : l’histoire douloureuse de Mutumba
« La Commission Vérité et Réconciliation met en lumière un passé caché et représente un signe d’espoir pour la future réhabilitation des familles des victimes », déclare Jérôme Habarugira, enseignant à l’école fondamentale de Kigoma dans la commune de Mutumba. Selon les témoins, la colline Gisimbawaga à Mutumba a été particulièrement dévastée tant par le génocide de 1972 que par la guerre civile de 1993, avec des crimes perpétrés à travers des tueries inter-collinaires et des attaques militaires utilisant hélicoptères et véhicules blindés en 1993.
Un phare dans la quête de vérité et de justice transitionnelle
Cette campagne d’affichage s’inscrit dans une démarche plus large de la Commission Vérité et Réconciliation, qui poursuit inlassablement ses efforts pour documenter et reconnaître publiquement les atrocités commises pendant plus d’un siècle d’histoire burundaise. La Commission Vérité et Réconciliation démontre sa détermination à déterrer les vérités douloureuses du passé, étape indispensable vers la réussite de l’objectif de la justice transitionnelle.

En collaborant avec les autorités locales et les communautés, elle établit progressivement un socle solide pour une réconciliation nationale authentique, fondée sur la reconnaissance des souffrances de toutes les victimes et la documentation méticuleuse des crimes qui ont déchiré le tissu social burundais pendant des générations.