Dans une démarche historique, le ministère de la Justice a officiellement remis mardi 10 juin 2025 l’intégralité des dossiers fonciers en sa possession à la Commission Vérité et Réconciliation. Cette transmission massive de plus 73 000 dossiers marque une étape cruciale dans la résolution des conflits fonciers qui minent le Burundi depuis des décennies. Un transfert massif pour tourner la page des crises.
La cérémonie organisée en mairie de Bujumbura a marqué un tournant décisif dans la gestion des conflits fonciers au Burundi. En présence de la ministre de la Justice Domine Banyankimbona et des commissaires de la Commission Vérité et Réconciliation , cette remise officielle concerne tous les dossiers détenus par les institutions judiciaires : ceux de la Cour Spéciale des Terres et autres Biens (CSTB), de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB), ainsi que les plaintes déposées directement au ministère de la Justice.
Cette démarche englobe également les dossiers dont les enquêtes sont en cours dans les parquets, particulièrement ceux liés aux crimes découlant de conflits fonciers. Une approche globale qui témoigne de la volonté des autorités de confier à la Commission Vérité et Réconciliation l’ensemble du contentieux foncier national.
Des chiffres qui révèlent l’ampleur du défi
Les statistiques dévoilées lors de la cérémonie illustrent l’ampleur du travail qui attend la Commission Vérité et Réconciliation . Au niveau provincial, pas moins de 65 982 dossiers ont été recensés depuis la création de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB), dont 48 087 ont déjà fait l’objet d’un traitement. Cela laisse 17 895 cas en attente de résolution dans les provinces.

Au niveau national, la situation révèle une charge de travail considérable avec 7 008 dossiers fonciers identifiés. Parmi ceux-ci, seuls 3 185 ont été traités à ce jour, laissant 3 823 dossiers en suspens. Ces chiffres reflètent les séquelles des crises cycliques qui ont secoué le pays et la complexité des enjeux fonciers burundais.
La Commission Vérité et Réconciliation face à sa mission historique
Pour Mgr Aimé Joseph Kimararungu, vice-président de la Commission Vérité et Réconciliation, ces dossiers fonciers constituent l’héritage direct des crises cycliques traversées par le Burundi. La Commission poursuit parallèlement son travail d’accueil et de collecte des témoignages de tous les plaignants, s’inscrivant dans une démarche exhaustive de la recherche de la vérité.

Cette remise représente une lueur d’espoir pour les justiciables qui attendaient depuis des années que leurs dossiers soient pris en charge par l’institution spécialisée dans la réconciliation. Elle démontre également que la Commission Vérité et Réconciliation assume pleinement la mission confiée par les pouvoirs publics dans sa quête de vérité au service de la réconciliation nationale.
Un calendrier serré pour un défi de taille
L’ambassadeur Pierre Claver Ndayicariye, président de la Commission Vérité et Réconciliation , a annoncé un calendrier ambitieux convenu avec le ministre de la justice : tous les dossiers et jugements encore détenus dans le pays devront être remis à la Commission d’ici le 15 juillet 2025. Un délai qui témoigne de l’urgence accordée à cette question.

Le président de la Commission Vérité et Réconciliation a souligné la volonté manifeste des autorités nationales et judiciaires de soutenir cette démarche. Il a néanmoins appelé les justiciables à la patience, le temps que la Commission Vérité et Réconciliation forme son nouveau personnel et procède à l’analyse approfondie des nouveaux dossiers. Dans les semaines à venir, des séances de concertation avec les justiciables concernés par des conflits fonciers seront organisées.
Cette journée du 10 juin 2025 restera gravée dans l’histoire de la justice burundaise comme le moment où le pays a choisi de confier à la vérité et à la réconciliation le soin de panser les blessures foncières héritées de son passé tumultueux.